Le patrimoine religieux communal : une gestion complexe qui questionne sur son devenir

10 Oct, 2023

En France, plus de 40 000 édifices religieux catholiques sont à la charge des communes.

Les dépenses de fonctionnement (entretien régulier, chauffage, etc.) et d’investissement (restauration, travaux lourds, etc.) reposent donc sur ces dernières.

Or, ce patrimoine est vieillissant et leur architecture spécifique engendre des coûts conséquents, souvent bien supérieurs aux capacités budgétaires des collectivités. À cela s’ajoute un contexte de sécularisation croissante de la société, conjuguée à la désertification de certaines zones géographiques, qui fragilise encore davantage le devenir du patrimoine religieux.  

Les communes se retrouvent ainsi confrontées au risque d’abandon et de fermeture au public d’une partie de ce patrimoine (notamment pour les édifices non protégés dans les territoires ruraux).  

Contexte historique et réglementaire des édifices religieux en France

Sous l’Ancien régime, chaque édifice religieux était associé à une paroisse ; l’autorité religieuse avait donc à charge ces biens. C’est durant la Révolution française que cette situation évolue avec la nationalisation des biens du clergé, aboutissant à l’adoption du régime du Concordat en 1802 qui statue l’appropriation des édifices religieux par des établissements publics du culte.

Un nouveau rebondissement a lieu en 1905, avec la loi de séparation des Églises et de l’État. Cette loi prévoit initialement un transfert de la gestion vers des associations cultuelles. Cependant, l’Église catholique refusant de s’organiser de cette façon, l’article 9 de la loi de 1905 acte le fait que pour tous les édifices n’ayant « pas été restitués ni revendiqués dans le délai légal » par l’Église, ces derniers « deviendront la propriété des communes sur le territoire desquelles ils sont situés ».

Dès lors, l’essentiel des églises construites avant 1905 deviennent propriété des communes. Pour sa part, l’Église catholique est propriétaire des églises construites après 1905, via des associations diocésaines.

Un dernier détail réglementaire est à évoquer car central dans les questionnements aujourd’hui du devenir de ces lieux. En effet, bien que la loi 1905 donne la propriété aux communes, la loi du 2 janvier 1907 précise que l’affectation des édifices restent à l’Église catholique. Autrement dit, si les communes veulent changer l’usage du lieu ou y intégrer des activités autres que cultuelles, elles doivent avoir l’accord de l’autorité religieuse. La commune possède, mais ne dispose pas.

Quelles orientations prendre pour maintenir ce patrimoine ?

Cet héritage historique pèse aujourd’hui sur les communes. En effet, le vieillissement du parc, le manque de moyen financier, le déficit d’ingénierie dans les services communaux ou encore les relations parfois conflictuelles entre le propriétaire (commune) et l’affectataire (l’autorité religieuse) mènent souvent à une situation de blocage, et in fine de danger pour le bon entretien et la sécurisation des sites. C’est pourquoi la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat a souhaité faire la lumière sur l’état et le devenir du patrimoine religieux en publiant un rapport d’information en juillet 2022.

Dans ce rapport assez alarmant, un certain nombre de recommandations sont énoncées, s’articulant autour de 3 axes :

  • Assurer une meilleure protection du patrimoine religieux le plus menacé, à travers un état des lieux à l’échelle nationale afin d’avoir une photographie plus précise de la situation.
  • Assurer un meilleur accompagnement pour les maires, via la mise en place plus conséquente d’aides financières et techniques ou encore le développement de procédures et d’outils à l’échelle départementale.
  • Permettre une réappropriation et une resocialisation des édifices cultuels.

Le dernier axe est particulièrement intéressant à développer dans le sens où il nous invite à requestionner les usages de ces édifices qui souffrent d’une occupation de moins en moins importante. C’est dans ce sens que le sujet de la désaffectation est de plus en plus évoqué, car il permet d’imaginer dans les églises désaffectées des usages autres que cultuels. En effet, l’article 13 de la loi de 1905 autorise la désaffectation d’une église. Elle autorise, mais elle s’applique seulement si l’affectataire, c’est à dire l’évêque du diocèse où se situe l’édifice, donne son accord.

Longtemps la question de la désaffectation que l’on nomme également « désacralisation » pour désigner la procédure canonique, était assez sensible. Mais elle a tendance à être davantage acceptée avec les bons retours des premiers projets de désaffection. Nous pouvons citer par exemple la réhabilitation de l’église Sainte-Marie de Sarlat (Périgord Noir) en marché couvert en 2001 par l’architecte Jean Nouvel ou encore l’église Saint-Etienne de Dijon qui abrite aujourd’hui le musée Rude et la bibliothèque municipale. L’observatoire du patrimoine religieux met à jours chaque mois la liste des édifices religieux reconvertis ou transformés.

Sans aller jusqu’à la désaffectation, les sénateurs en charge du rapport prônent un usage partagé. Le code général de la propriété des personnes ouvre en effet la possibilité d’un usage partagé du patrimoine religieux depuis 2006, avec l’utilisation des édifices pour des activités non cultuelles « compatibles avec l’affectation cultuelle ». Ces activités peuvent être culturelles (concert, expositions…), touristiques (visites, musées…) ou encore sociales (refuges pour des personnes dans le besoin, accueil d’élèves en période d’examen…).

Comment apporter des acteurs supplémentaires ?

Il est évident que le maintien des édifices religieux passe par une meilleure connaissance de leur état de vétusté ainsi que par un meilleur accompagnement, en termes financier et de compétence, pour les communes. Au-delà de ce prérequis, la question de l’usage est centrale pour assurer leur rayonnement et dynamisme, et ainsi apporter de potentiels acteurs et retombés économiques supplémentaires.

À travers ses missions de Schéma Directeur Immobilier et Energétique (SDIE), la société tbmaestro a pour objectif d’optimiser et valoriser le patrimoine des collectivités pour lesquelles elle travaille. Le SDIE se construit ainsi sous l’œil de l’état technique des bâtiments mais également sous l’angle de l’occupation et de la fonctionnalité de ces derniers. Une méthodologie qui s’inscrit pleinement dans les problématiques actuelles des édifices religieux.

Enfin, comme le rapport d’information du Sénat l’indique, imaginer ancrer le patrimoine religieux davantage dans son territoire « n’est pas contradictoire avec la vocation cultuelle des édifices ; il s’agit plutôt d’un retour aux sources : jusqu’à la Révolution française, les activités cultuelles et les activités humaines cohabitaient au sein des églises. »    


Mots clés : gestion d’actif physique, église, lieu de culte, usage partagé, désaffection, désacralisation, réappropriation, resocialisation, valorisation

Date de l’article : 10/10/2023

Sources :

https://www.senat.fr/notice-rapport/2021/r21-765-notice.html

https://www.vie-publique.fr/questions-reponses/286218-le-patrimoine-religieux-et-les-communes-le-point-en-cinq-questions

https://www.patrimoine-religieux.fr/rubriques/gauche/edifice-menace/eglises-transformees-et-rehabilitees

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