Décarbonation : le secteur du transport aérien peut-il réellement être à l’heure du rendez-vous ?
5 Déc, 2023
En 2019, la France s’est fixée comme objectif national d’atteindre la neutralité carbone en 2050 via la loi énergie-climat et le secteur des transports est particulièrement concerné par ces attentes. Bien que les chiffres varient quelque peu, le transport est devenu la première activité émettrice de gaz à effet de serre du pays avec près d’un quart des émissions totales. Le secteur aérien, lui, est responsable de 6,8% des émissions de CO2 de la France selon la DGAC.
Aéroports : un constat plutôt positif
Ces dernières années, on assiste à une vraie prise de conscience des gestionnaires aéroportuaires, et ce, notamment en France. En témoignent de nombreux projets concrets portés par l’ensemble des acteurs, indépendamment de leur taille. Ces projets permettent aux exploitants d’aéroports de limiter fortement leurs émissions de CO2.
Parmi ces projets, on peut citer :
La création de centrales solaires sur des zones aéroportuaires délaissées comme à Pierrefonds (La Réunion) ou par l’intermédiaire d’ombrières de parking, comme à Lyon Saint-Exupéry, qui permettront, en plus d’alimenter l’aéroport, de suppléer le réseau électrique public voisin.
Le renouvellement et l’électrification des flottes de véhicules de service, comme cela a été fait par les Aéroports de la Côte d’Azur depuis 2020.
La fourniture de moyens de substitution électrique directement au sol sur les postes de stationnement des avions via la mise en place de puissantes bornes électriques. Ces équipements servent à fournir de l’énergie à l’avion pour assurer le démarrage des moteurs principaux ainsi que la fourniture d’air conditionné et d’éclairage, lorsqu’il stationne, tout en évitant l’utilisation des moteurs auxiliaires de puissance (APU), qui fonctionnent grâce au kérosène.
D’un point de vue bâtimentaire, les aéroports sont eux-aussi concernés par le décret tertiaire. Les terminaux, les commerces et les bureaux administratifs sont autant de typologies assujetties à la réduction des consommations énergétiques dès 2030. Ainsi, le décret tertiaire joue un rôle essentiel, même pour un aéroport, dans la transition vers des bâtiments plus respectueux de l’environnement et moins émetteurs de CO2.
À l’ère de la responsabilité sociétale des entreprises, de plus en plus d’organisations ressentent le besoin de rendre compte de leurs actions. Cela se traduit par un recours massif aux certifications internationales, notamment Airport Carbon Accreditation (ACA), venant attester des efforts consentis par les gestionnaires aéroportuaires en vue de la réduction de leurs émissions. Une nouvelle fois, la France fait office de figure de proue dans cette démarche. En effet, les plateformes françaises représentaient, en 2022, près de 30 % du nombre total d’aéroports accrédités en Europe (219) et 15 % à l’échelle mondiale (425). Cette certification renforce la confiance des clients et démontre l’engagement des exploitants aéroportuaires envers des pratiques durables.
Mais il est évident que les émissions au sol (hors roulage) ne représentent qu’une part infime (environ 5%) du total. Il y a donc une nécessité d’engager l’ensemble des acteurs pour atteindre cet objectif ambitieux.
Compagnies aériennes et avionneurs : les principaux concernés
Sans surprise, environ 95% des émissions du secteur aérien proviennent du mouvement des avions (roulage et vol), soulignant le rôle majeur des compagnies et des constructeurs pour atteindre des objectifs globaux. Les défis à relever exigent d’importants investissements, mais les acteurs impliqués sont ambitieux et considèrent la technologie comme la clé pour rendre les avions plus respectueux de l’environnement.
D’ici 2050, quatre grands postes pour réduire les émissions sont identifiés :
Une réduction de 40 à 50 % venant des carburants utilisés.
Une réduction de 35 et 40 % venant des meilleures performances des avions eux-mêmes.
Une réduction de 5 à 10 % venant de l’amélioration des opérations.
Une compensation de 5 à 10 % des émissions restantes.
Lorsqu’on évoque la décarbonation de l’aérien, la question centrale concerne le type de carburant utilisé par les aéronefs. Des programmes visant l’utilisation de carburants dits « écologiques », comme les biocarburants d’aviation durables (SAF), sont en développement. Cependant, les quantités actuelles de SAF mélangées aux carburants fossiles sont encore insuffisantes pour avoir un impact significatif. Notons cependant que les acteurs européens du secteur ont pris l’engagement d’atteindre 20% de SAF dans le mix de carburants de l’aviation d’ici 2035 et 70% d’ici 2050 dans l’espoir de réduire l’empreinte carbone des vols.
Un autre levier important consiste à accroître l’efficacité énergétique des avions, principalement en réduisant leur masse, entrainant une moindre consommation. Dans cette perspective, les avionneurs développent de nouveaux modèles en utilisant des matériaux de pointe et en tirant parti des avancées technologiques. Les compagnies aériennes, elles, s’efforcent de moderniser leurs flottes vieillissantes malgré les coûts d’acquisition élevés associés.
La question de réduction des émissions revient donc à une question de réduction des consommations. Cela pousse les professionnels du secteur à explorer de nouvelles méthodes de propulsion. La plus connue est sans doute l’utilisation de l’hydrogène qui représente un défi technologique énorme. Pour cela, il sera nécessaire de revoir la conception des appareils afin de satisfaire à toutes les exigences de stockage à l’intérieur de l’avion sans augmenter la masse de ce dernier. Mais surtout, d’être capable de disposer d’ »hydrogène vert » (produit à partir d’énergies renouvelables) et de posséder une infrastructure de stockage sur site et d’acheminement de l’hydrogène vers les avions. C’est en ce sens que le Groupe ADP a récemment annoncé la création d’une coentreprise avec Air Liquide (Hydrogen Airport) pour préparer ses aéroports à prendre en charge les vols à l’hydrogène.
Outre l’hydrogène, Airbus prépare également son projet d’avionhybride : l’association d’un moteur électrique, qui servira au décollage et à l’atterrissage, à trois autres moteurs à combustion (au kérosène) pour le reste du trajet. De plus, on assiste à l’émergence d’avions entièrement électriques. Mais son utilisation demeure pour les petits trajets en raison d’une autonomie limitée à quelques centaines de kilomètres et du faible nombre de places des appareils. Des succès se sont déjà fait connaître comme le Velis Electro de Pipistrel et ouvrent la voie à d’autres développements.
En parallèle, des projets tels que les EVTOL (aéronef à décollage et atterrissage verticaux électrique) continuent de susciter l’intérêt des grands avionneurs (Airbus, Boeing ou Embraer) pour disposer d’une alternative aux énergies fossiles.
Enfin, d’autres gains, plus faibles, résident dans l’optimisation des opérations aéronautiques. Ceux-ci concernent la réduction des temps de roulage au sol par la révision des procédures ainsi que l’optimisation des trajectoires des avions.
Mais qui font face à de fortes limites
Cependant, malgré leur promesse initiale, ces projets sont confrontés à des contraintes considérables, suscitant ainsi de nombreuses incertitudes quant à la réalisation de leurs objectifs.
Le recours au 100% SAF, même si les moteurs le permettaient, n’est pas envisageable immédiatement. Déjà, son prix est 5 à 6 fois plus élevé que celui du kérosène. Ensuite, les besoins en électricité pour produire ce carburant sont considérables et pour le moment insoutenables. Il est en effet estimé qu’en 2050, la production de SAF nécessaire pour atteindre les 70% d’inclusion mobiliserait à elle seule, la moitié de la production mondiale électrique. Mais surtout, le SAF n’est pas 100% vertueux, car il faut disposer de grandes quantités de biomasse, d’algues, de cultures agricoles ou de déchets. Cela implique donc de disposer de grandes surfaces de terres dédiées à ces productions.
Ensuite, l’avion à l’hydrogène est un défi technologique qui nécessite des investissements colossaux, ce qui pose une question temporelle. De tels développements seront très longs et l’on estime que les avions à hydrogène ne seront opérationnels que d’ici 15 ans (Airbus vise les premiers vols pour 2035). Or l’aérien a aujourd’hui besoin de solutions immédiates.
À l’encontre de l’argument axé sur la technologie, vient l’argument en faveur de la réduction du trafic aérien. Malgré une tendance actuelle à la croissance, illustrée par une augmentation moyenne de 6% par an, il demeure manifeste qu’une réduction des vols engendrerait une baisse de la consommation de carburant, entraînant ainsi une réduction directe des émissions de CO2. Des leviers pour parvenir à cette réduction sont déjà en place, notamment via la promotion d’autres modes de transport, des politiques de réglementation plus strictes et la tarification du carbone. Des actions concrètes témoignent de cette évolution, comme l’interdiction des vols intérieurs en cas d’alternative ferroviaire efficace en France ou le plafonnement du nombre de vols annuels à l’aéroport de Schiphol.
Quelque soit les leviers actionnés dans la quête de réduction des émissions, il demeure crucial d’apporter une considération particulière à la chaîne de valeur du transport aérien dans sa globalité. La gestion d’actifs est une pratique qui permet, dans un écosystème aussi complexe, de s’assurer de la coordination et de la cohérence de l’ensemble des mesures et actions entreprises par la multitude d’acteurs concernés. C’est en ce sens, que tbmaestro accompagne des gestionnaires de plateformes aéroportuaires depuis plusieurs années, dans l’optimisation du cycle de vie de leurs bâtiments et infrastructures ainsi que dans la mise en place d’une stratégie de gestion d’actifs pérenne et vertueuse en adéquation avec des objectifs d’efficience énergétique maximale et en lien avec les avancées du secteur aérien.
Mots clés : décarbonation, transport aérien, SAF, avion, aéroports, émissions, gestion d’actifs physiques
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