La rénovation énergétique en France : un défi en termes de main-d’œuvre
21 Nov, 2023
Pour atteindre les ambitions de la rénovation énergétique définies par la Stratégie Nationale Bas-Carbone (SNBC) en France, un surcroît d’investissement annuel estimé entre 20 et 30 milliards d’euros dans le secteur de la rénovation est envisagé avant fin 2030. Cet accroissement financier, bien qu’indispensable, ne constitue pas une solution exhaustive. Une interrogation prédomine donc :
La France disposera-t-elle d’une main-d’œuvre suffisante dans le secteur de la construction, pour répondre à la demande grandissante en travaux de rénovation énergétique ?
En effet, les estimations (de France stratégie) indiquent la nécessité de créer entre 170 000 et 250 000 nouveaux emplois d’ici 2030 dans le secteur de la rénovation énergétique des bâtiments. Ajoutant à cette nécessité de nouveaux emplois les départs à la retraite des travailleurs seniors, environ 635 000 postes devront être pourvus d’ici 2030 dans les métiers du bâtiment, soit 37% de l’emploi actuel dans ce secteur.
Toutefois, le nombre de jeunes entrants risque d’être insuffisant au vu des premières perspectives. En effet, aujourd’hui en France, la tendance est plutôt la stagnation du nombre d’emplois dans le milieu.
Cette stagnation est probablement attribuable au déclin récent dans la construction de nouveaux logements (illustré par le graphique ci-après), arrêtant temporairement la croissance de la masse salariale. Néanmoins, dans un futur proche, des difficultés de recrutement pourraient surgir en raison de l’escalade des taux d’intérêt et de la réduction de la capacité d’emprunt des ménages.
Figure 1 : Nombre de logements cumulés sur 12 mois (en milliers)
Horizon 2030 : une projection audacieuse dans un marché déjà saturé
Les ambitions énoncées par le SGPE aspirent à réduire les émissions de 61 % en 2030 par rapport à 2019, avec une accélération particulière sur le secteur résidentiel. Ce dernier devrait contribuer à hauteur de 60% à cet effort, principalement par la substitution des sources énergétiques carbonés (gaz, fioul) et l’amélioration de l’isolation thermique des logements les plus consommateurs d’énergie comme le montre l’encadré ci-dessous.
Figure 2 : Cibles de baisse des émissions directes liées à l’usage des bâtiments
Les objectifs quantifiés à atteindre d’ici 2030 évoqué par SGPE sont les suivants :
• Amélioration de l’isolation thermique de 60 % des logements qualifiés de « passoires énergétiques ».
• Remplacement de 75 % des chaudières au fioul et 20 % des chaudières à gaz, principalement par des pompes à chaleur, des réseaux de chaleur urbains et l’utilisation de la biomasse.
• Augmentation de la part du biogaz dans le réseau à 15% (soit 50 TWh produit en 2030).
• Réduction de 40 % de la consommation d’énergie finale dans le secteur tertiaire privé.
• Poursuite des efforts de sobriété énergétique, notamment par la modulation des températures intérieures dans les logements.
Les efforts à consentir sur le marché du travail pour atteindre les objectifs de ces scénarios
Afin d’atteindre ces objectifs, des scénarios ont été envisagés pour 2030. Trois modèles distincts sont mis en avant voici une rapide synthèse des éléments qui peuvent les définir :
Le scénario Bas-Carbone Métiers 2030, de France Stratégies et de la Dares
Rénovations performantes des passoires énergétiques.
Mise en œuvre du dispositif Éco Énergie Tertiaire.
Pas de baisse de la construction neuve.
Build Up Skills 2 (BUS 2) de l’ADEME
Rythme soutenu de rénovations performantes (BBC).
Forte dynamique de décarbonation des vecteurs.
Mise en œuvre du dispositif Éco Énergie Tertiaire.
Forte baisse de la construction neuve.
Scénario négaWatt 2022-2050 de l’Association négaWatt
Rénovations complètes et performantes des logements classés F et G en priorité.
Forte dynamique de décarbonation.
Mise en œuvre du dispositif Éco Énergie Tertiaire.
Forte baisse de la construction neuve.
Le scénario Bas-Carbone Métiers 2030, de France Stratégies et de la Dares, souligne la nécessité d’investissements conséquents afin d’atteindre les conformités relatives aux directives de la SNBC 2. Ainsi, une injection supplémentaire de 15 milliards d’euros par an en moyenne et l’intégration de prix fictifs du carbone sont préconisées dans le scénario bas-carbone, portant les investissements totaux dans le secteur du bâtiment à 43 milliards d’euros en 2030, soit une augmentation de 28 milliards d’euros par rapport à 2019.
Pour le scénarioBUS 2, un montant annuel d’investissements dans la rénovation énergétique du résidentiel et du tertiaire de 39 milliards d’euros en 2019, qui grimpe à 70 milliards d’euros en 2030, soit une progression de 31 milliards d’euros.
Quant au scénario négaWatt, il projette une augmentation des investissements de 15 à 36 milliards d’euros entre 2019 et 2030, soit une hausse de 21 milliards d’euros.
Ces investissements conséquents ne pourront être réalisés qu’avec des ressources humaines en nombre et adaptées.
Au niveau national, et pour la période 2019-2030, un travail sur la répartition des emplois supplémentaires a été effectué. Il se décline par département en fonction des objectifs de rénovation énergétique, tout en prenant en compte les disparités territoriales. La clé de répartition départementale de ces besoins pour 2030 a été élaborée sur la base du nombre de passoires énergétiques, de logements chauffés au fioul et au gaz à rénover dans le résidentiel, et de la consommation d’énergie du secteur tertiaire. La carte ci-dessous illustre clairement la disparité relative au besoin de création d’emplois nécessaires à la rénovation énergétique sur le territoire français.
Figure 3 : Création d’emplois dans la rénovation énergétique des bâtiment (2019-2030)
La transition vers la rénovation énergétique des bâtiments devrait amplifier les défis liés au recrutement des professionnels impliqués dans ces travaux.
Afin de prévenir des pénuries de main-d’œuvre susceptibles de ralentir ou décaler la cadence de cette transition énergétique, il est impératif de s’attaquer aux causes fondamentales affectant l’attrait de ces métiers. L’amélioration des conditions de travail, la rémunération ou encore la diversité des effectifs sont autant de paramètres à prendre en compte. De plus, encourager la réaffectation des professionnels du secteur du bâtiment neuf vers celui de la rénovation s’avère crucial.
Par ailleurs, un rôle peut être mené par la maitrise d’ouvrage ainsi que la maitrise d’œuvre afin de faire partie de la solution à cette problématique sociétale : la planification et la priorisation des bâtiments devant recevoir une rénovation énergétique. Dans ce contexte, tbmaestro, à travers le Schéma Directeur Immobilier Énergétique, permet de mettre en place une stratégie bâtimentaire et énergétique adaptée, en hiérarchisant les actifs les plus critiques, grâce à une approche multicritère où la dimension énergétique occupe une place prépondérante.
Mots-clés : Rénovation énergétique, Emploi, Marché du travail, recrutement, Bâtiment, Stratégie Nationale bas carbone, Négawatt, ADEME
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